Paroisse Saint Loup


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Homélie du dimanche 6 novembre 2016

XXXIIème dimanche du Temps de l’Eglise – Année C

Attachés au temple de Jérusalem et à la tradition du Pentateuque, les sadducéens réfutent ce que croient les pharisiens : la résurrection. Prenant le cas de la veuve aux sept maris successifs, ils posent la question : si la vie se poursuit après la mort, qu’en est-il des institutions divines ? Si la Genèse affirme que mari et femme « ne feront qu’une seule chair », cela ne reste-t-il pas vrai dans la vie éternelle ? La réponse de Jésus surprend : on ne se marie pas dans la vie éternelle, parce qu’on ne peut plus mourir… Dès lors, avec le Christ, le mariage devient promesse par laquelle l’homme et la femme se tournent vers la vie de Dieu. Puisant au quotidien à la source de leur amour, ils se conduisent l’un l’autre jusqu’au Royaume de la vie.

Indépendamment de cette considération initiale sur le mariage selon la loi naturelle, personne ne sera surpris de m’entendre dire que les questions que posent les textes que nous venons d’accueillir sont aussi vieilles que le monde et qu’elles n’ont reçu aucune réponse valable, du moins sur le plan scientifique ou philosophique. En effet, qui pourrait affirmer rationnellement qu’il y a une vie après la mort ?! Seules des religions ou philosophies proposent quelques pistes :

. La mythologie gréco-latine prétendait que les morts étaient rassemblés en un lieu où ils menaient une existence banale ;
. Jusqu’au 2ième siècle avant Jésus-Christ, les Juifs pensaient la même chose ;
. L’hindouisme enseigne la réincarnation dans d’autres êtres mortels ;
. Le bouddhisme propose des voies d’accès à la paix bienheureuse dans le Nirvana.

C’est vers la fin du 2ième siècle avant Jésus-Christ que l’Ancien Testament parle de résurrection des corps dans le Deuxième Livre des Martyrs d’Israël (VII, 1-2.9-14) dont nous avons entendu un extrait dans la première lecture où il est dit : « Mieux vaut mourir par la main des hommes quand on attend la résurrection promise par Dieu. » Mais de quoi s’agit-il ? Quel est le sens de ces mots ?

Selon le dictionnaire, le verbe « ressusciter » veut dire : « passer de la mort à la vie » ou bien « réveiller ». Je pense que c’est cette dernière définition qui permet de comprendre de quoi il s’agit ; c’est difficile mais je vais essayer d’être clair.

En pensant à une maxime du philosophe Platon qui disait que « seul est digne d’exister celui qui est digne d’être aimé », le Père VARILLON disait : « Seul est digne d’exister celui qui aime ».

Il faut bien reconnaître que nous n’aimons pas toujours ; c’est vrai, nous nous efforçons d’aimer à longueur de jours et d’années, mais nous restons esclaves de bien des choses et en bien des manières. Nous nous accrochons à ce que nous avons et nous n’arrivons pas toujours à être maîtres de notre caractère, de notre tempérament ou de notre humeur… Nous ne sommes donc pas totalement libres… Il y a en nous des trésors de générosité, de tendresse, d’amitié ou d’amour, mais qui sont un peu prisonniers de nos limites, de nos faiblesses, de nos imperfections ou de notre éducation.

Je pense que la mort de notre corps réveille tout ce qu’il y a de meilleur en nous pour parvenir à un épanouissement total. Oui, la mort de notre corps permet à tout ce qu’il y a de meilleur en nous d’atteindre sa perfection.

Certaines personnes connaissent déjà un peu ce réveil de générosité, d’amour ou d’amitié en luttant contre ces chaînes que sont l’égoïsme, l’orgueil, la jalousie, l’avarice ou autres choses de ce genre-là.

Nous en avons-nous-mêmes fait l’expérience quand nous avons été capables de gestes de réconciliation, de paroles de paix ou de démarches de partage… Nous avons alors senti que l’Amour prenait le dessus et, si nous sommes croyants, nous nous sommes alors sentis plus profondément unis à Dieu et aux autres. Ne l’oublions pas : aimer, c’est vivre pour quelqu’un d’autre, mais vivre pour quelqu’un d’autre, c’est toujours un peu mourir à soi-même.

Selon l’Écriture, le Christ est mort pour nous et c’est cette mort qui a rendu évident, explicite et même compréhensible l’Amour de Dieu pour le monde. Cet Amour de Dieu était ignoré, caché. La mort de Jésus l’a fait éclater au grand jour en le réveillant.

Mais cette mort de Jésus ne s’est pas faite seulement sur la croix. La plupart des théologiens reconnaissent aujourd’hui que Jésus, étant vraiment homme, ne savait pas tout et qu’il a dû apprendre à aimer en faisant des choix de renoncement. Rappelons-nous les tentations au désert.

C’est donc petit à petit, au cours de ses rencontres que Jésus, progressivement, a pris conscience et fait prendre conscience de l’Amour que Dieu a pour tous.

Sa mort sur la croix a été le point d’orgue mais il y a beaucoup d’autres petites « morts » et donc aussi d’autres petites « résurrections » tout au long de sa vie.

Qu’il en soit de même pour nous ! Si nous croyons que la mort de notre corps ne détruira pas ce qu’il y a de meilleur en nous, profitons du temps qui nous est donné à vivre pour réveiller, pour ressusciter tout ce qui est beau en nous afin de le partager avec d’autres, de notre vivant.

C’est la même chose pour les fleurs : n’attendons pas que ceux que nous aimons soient morts pour en mettre sur leur tombe ! Offrons-leur ces fleurs pendant qu’ils vivent !

N’attendons pas que la mort de notre corps libère ce qu’il y a de beau en nous… Libérons nos qualités, nos dons, nos capacités d’amour dès maintenant ! C’est cela, je pense, ressusciter.

Tout ce que je vous ai dit ne répond à aucune question. Mais pour moi, c’est cela la Foi. Non pas seulement la Foi en une vie après la mort, mais déjà la Foi en tout ce qui est vivant en chacun de nous et qui, je crois, ne mourra pas parce que cela nous a été donné par Dieu et que Dieu ne reprend pas ce qu’il a donné.

Père Thibault NICOLET