Paroisse Saint Loup


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Homélie du samedi 10 décembre 2016

Troisième dimanche de l’Avent – Année A Eglise de Saint-Barthélémy du Gua

« Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Le doute de Jean-Baptiste n’est-il pas légitime ? Le prophète est en prison, et ce qu’on lui rapporte ne correspond guère à ce qu’il espérait de Jésus. Il attendait un homme fort qui remettrait les pendules à l’heure, prononcerait des sanctions, répandrait les fruits de la colère de Dieu. A-t-il fait erreur, trompé son auditoire ? La perplexité du Baptiste peut aussi être la nôtre : n’aimerions-nous pas que Jésus nous débarrasse une bonne fois pour toutes de ceux qui ne marchent pas droit, qu’il écarte ceux que nous jugeons indignes de l’Église ?
Si Jésus est bien le Messie dont on rêvait depuis des siècles, il ne l’est pourtant pas tel qu’on l’imaginait. Sa façon d’exécuter la vengeance de Dieu est déroutante, toute proche de ce qu’Isaïe avait annoncé : les aveugles retrouvent la vue, les sourds entendent… Une œuvre de libération, de restauration, d’abord en faveur de ceux qui en ont le plus besoin : les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. Le plus petit, celui que l’on vient servir, est pour Jésus plus grand que celui qui prépare à le rencontrer ! Une transformation profonde s’opère. Humble, discrète, lente, parce qu’elle marche au pas de la relation établie avec chacun. On n’ouvre pas les fleurs avec les doigts et on ne tire pas sur les brins d’herbe pour les faire pousser. Il y faut beaucoup de patience, dira saint Jacques. « Le bruit ne fait pas de bien mais le bien ne fait pas de bruit » aimait à enseigner saint François de Sales. Sommes-nous de ces pauvres dont les yeux et les oreilles s’ouvrent ?
Malgré le brouhaha médiatique centré sur les catastrophes ou sur ce qui va mal, pouvons-nous discerner les merveilles que le Christ accomplit jour après jour dans le monde ? Goûtons-nous à cette éternelle joie qui nous est promise ?

Le Seigneur fait justice aux opprimés ;
Aux affamés, il donne le pain ;
le Seigneur délie les enchaînés. (…)
D’âge en âge, le Seigneur régnera.
Psaume 145

Seigneur, nous t’en prions, retire le voile qui peut nous empêcher de reconnaître les signes de ta présence dans le monde. Que chaque geste par lequel ton salut est manifesté soit pour nous source d’espérance et de joie. Accorde-nous de contribuer à notre mesure, à hâter ta venue en apportant notre pierre pour bâtir ton Royaume. Viens Seigneur Jésus !

En écoutant ce soir cet extrait du Livre d’Isaïe, un grand enseignement s’en dégage. Il se pourrait que le désert, par la grâce de Dieu et le travail des hommes, ne soit pas condamné à l’infécondité mais qu’il puisse se parer de fleurs à l’égal des plus belles régions. Voulons-nous le croire ? C’est à travers de tels passages de la mort à la vie que le Seigneur vient et se révèle vraiment. Sa vengeance, sa revanche, c’est de mettre la vie, d’apporter le salut là où des hommes ont semé l’exclusion, la haine, l’exil et la mort. Allégresse et joie parce que la vie triomphe. Modestement d’abord, mais de manière irréversible.
Quant à ce court extrait de la Lettre de saint Jacques, il vient nous rappeler que la vie commune n’est pas commode au quotidien, surtout lorsqu’il s’agit d’une communauté comme celle de Jacques, composée de personnes de cultures si différentes. On aimerait bien que les autres changent plus vite. Et nous, sommes-nous disposés à nous laisser façonner ? Après les effets bénéfiques de la grâce baptismale, il faut durer et persévérer jusqu’à la venue du Seigneur.
Et au cœur de la page d’Évangile de ce dimanche de joie, la figure de Jean le Baptiste. Il se trouve dans la prison d’Hérode, il doute et se demande si Jésus est bien le Messie annoncé par les prophètes (et par lui-même !). Et pourtant, Jésus dit de Jean que « parmi ceux qui sont nés d’une femme, personne ne s’est levé de plus grand que lui !  » Alors, si un tel homme est en proie aux doutes et que l’évangile ne cherche pas à le cacher, c’est bien que nous aussi pouvons douter, de Dieu, du sens de la Vie et de notre présence sur terre…
A cela, le bon sens chrétien pourrait répondre facilement qu’entre l’absurde et le mystère, il vaut mieux choisir le mystère ! Mais telle n’est pas la réponse que Jésus donne aux envoyés du Baptiste. Au lieu de s’envelopper de mystère justement, Jésus les appelle à s’appuyer sur la réalité :«  Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez ». Et ce que les contemporains du Christ voient, c’est le Royaume de Dieu en marche (les aveugles retrouvent la vue, les sourds entendent, les morts ressuscitent…), ce qu’ils entendent c’est la Bonne Nouvelle, une annonce inouïe (au sens littéral) de bonheur et de justice pour tous. Comme l’annonçait Isaïe (dans la première lecture), les temps messianiques sont arrivés en la personne de Jésus. Et pourtant, le plus petit dans le Royaume des Cieux est plus grand que Jean le Baptiste, non pas en sainteté ou en don de soi, mais tout simplement parce que Jean ne connaît pas encore le visage de Dieu tel qu’il nous est révélé en Jésus : un Dieu dont la toute-puissance se fait « « toute-faiblesse » en un enfant nouveau-né…

Père Thibault NICOLET

Ne nous laissons pas voler notre joie !

Références des textes liturgiques :
Isaïe XXXV, 1-6a.10 ;
Psaume CXLV (CXLVI) ;
Épître de saint Jacques V, 7-10 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu XI, 2-11.