Paroisse Saint Loup


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Homélie pour le treizième dimanche du Temps Ordinaire, Année A

dimanche 28 juin 2020 église Saint-Pierre, Varces

« Qui vous accueille m’accueille »

Cette séquence évangélique en saint Matthieu, qui concerne les choix du disciple et son accueil, rejoint un passage antécédent qui va de l’envoi à l’accueil des missionnaires. Elle la rejoint par la résurgence de termes identiques (« paix », « digne », « accueillir ») en dessinant une progression assez semblable : 1) les conditions de départ (v. 34-36) ; 2) les conditions pour suivre Jésus (v. 37-39) ; 3) les situations d’accueil (v. 40-42). Mais, venant en conclusion, le texte ramasse d’autres thèmes du discours et ses perspectives s’élargissent au statut de tout disciple. Notons que Matthieu puise ici dans des traditions assez diverses.
Suivre le Christ impose le renoncement à des affections concurrentes (v. 37 ; cf. Luc XIV, 26, plus radical) et à ses propres sécurités. Il faut même envisager la croix (v. 38) si l’on opte pour une communauté de destin avec Jésus. Cette croix projette encore son ombre sur le verset 39 : chercher et trouver une vie authentique, c’est le but des sages. Mais il renonce à cette sagesse, celui qui se fait disciple du Christ en acceptant de « perdre sa vie » pour en trouver une autre, par-delà les épreuves mortelles.
L’identité entre le maître et le disciple atteint ici son sommet : recevoir l’envoyé de Jésus, c’est recevoir Jésus et, par là, Dieu lui-même (v. 40 ; cf. Luc X, 16 et Jean XIII, 20). Matthieu détaille cet accueil en trois degrés paradoxalement décroissants. Le verset 41 lui est propre : quelqu’un peut être reçu pour sa qualité de prophète, prédicateur de l’Évangile ; un autre, en tant que juste, une manière de désigner le scribe, enseignant « la justice » des Écritures. Enfin, au verset 42 (reprenant en substance Marc IX, 41), « un de ces petits », un chrétien quelconque, peut se voir reçu comme « disciple » de Jésus. La récompense (par Dieu) de l’accueil correspondra à la reconnaissance des envoyés de Jésus. Or, à présent, les préférences de Matthieu ne font plus mystère : l’essentiel, c’est d’être simplement reconnu comme un « disciple ».
Les versets 40-42 constituent la clé de la séquence conclusive et révèlent la visée pastorale de l’ensemble du discours.
1. Au temps de Jésus, les Douze ont vécu avant tout en disciples, suivant Jésus dans le dépouillement et la confiance, avant que n’existent les titres de « prophète » ou « juste » (scribe chrétien). C’est en cela qu’ils s’imposent comme modèle de la mission. Matthieu XI, 1 passe souvent pour la conclusion du discours ; il s’agit à vrai dire d’une transition : c’est Jésus qui s’en va « enseigner et prêcher », et les Douze continuent leur apprentissage à sa suite.
2. Dans l’Église de Matthieu des années 80, il y a une crise des ministères sur laquelle reviendra le chapitre XXIII : si les « prophètes », « justes » et autres « docteurs » se faisaient un peu plus disciples et un peu moins « maîtres », les choses iraient mieux…
3. Dans l’Église primitive, le titre d’apôtre englobe deux nuances : il s’agit des envoyés qui répandent l’Évangile et étendent l’Église (c’est la conception de Paul en Romains I, 5 ; XV, 16 ; XVI, 7) ; ils sont aussi représentants du Christ, identifiés à lui par leur message et leur comportement : nul doute que Matthieu estime devoir insister sur ce second aspect.

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques : Deuxième Livre des Rois IV, 8-11. 14-16a Psaume LXXXVIII (LXXXIX) Épître de saint Paul Apôtre aux Romains VI, 3-4. 8-11 Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu X, 37-42