Solennité de l’Epiphanie du Seigneur Année B
D 7/01/2024 église Saint Jean-Baptiste, Vif
L’étoile, le filet et la Croix
En ce temps de Noël, une force se dégage de cet enfant né dans une crèche. Il attire. Des hommes venus de loin se sont mis en marche pour le voir, le toucher et le prier. Quand ils l’ont trouvé sur les genoux de sa Mère, ils ne craignent pas de changer de route pour être guidés par cette nouvelle lumière qui les habite. Cette attirance du Christ toujours si vivace en 2024 étonne encore. Est reconnue dans le signe fragile du Dieu fait homme cette grâce qui arrache les cœurs des ténèbres. Quel prêtre n’a pas été touché dans son ministère pour avoir vu des personnes ‘venues de loin’ s’approcher du Christ et s’attacher à lui ? La scène de l’Epiphanie nous donne des indications sur quelques dimensions de la foi au Christ : la simplicité du cœur des rois mages, leurs gestes d’adoration, la valeur précieuse de leurs offrandes, le silence devant l’ineffable. En octobre 2012, une Année de la foi fut proclamée par le pape Benoît XVI. Nous l’avions confié à l’Enfant-Dieu et à Marie, sa Mère, pour qu’attirés par le Christ, ceux qui ‘viennent de loin’ trouvent dans l’Eglise une aide pour découvrir le Seigneur dans la joie et la vérité.
Isaïe voit prophétiquement monter et se rassembler au Temple l’immense caravane des peuples. Il décrit avec lyrisme cette épiphanie de Jérusalem. La venue de mages païens à Bethléem réalise la prophétie et l’espérance messianique devient réalité.
Ce fils de roi, que les nations païennes de Tarsis vénèrent et que tous les peuples servent, est bien ce nouveau-né de Bethléem, le Messie évangélisateur des pauvres en esprit.
Le secret du Père, son dessein d’amour, se révèle dans le Mystère de l’Incarnation rédemptrice du Christ ; venu pour tous les hommes, il dispense aux païens la grâce du salut.
Les premiers adorateurs du Messie-Roi, chez Matthieu, ne sont pas des bergers, mais des mages venus d’Orient. Une étoile, puis l’Écriture, ont guidé ces savants païens jusqu’à Bethléem ; ils offrent à l’Enfant, Lumière du monde, leurs présents royaux et messianiques.
« Où est le roi des Juifs ? » demandent les mages quand ils arrivent à Jérusalem (Matthieu II, 2). Où est réellement Jésus dans nos vies aujourd’hui, et surtout qui est-il ? Ces païens venus d’Orient accomplissent un voyage périlleux et affrontent les dangers de la route pour adorer un enfant d’une nation qui leur est étrangère. Ils lui offrent de précieux présents. Et nous, que faisons-nous pour adorer Jésus et lui faire une place de Roi dans notre vie ?
Elle est merveilleuse, cette fête de l’Épiphanie qui fait mention de ces mages venus d’Orient, magiciens, prêtres païens, astrologues ou autres devins, bien disposés et qui se mettent en mouvement à travers le désert, guidés par une étoile providentielle. Leur pérégrination va les conduire jusqu’à la capitale du peuple juif, pour finir dans ses faubourgs, le village de Bethléem d’où « sortira un chef, qui sera le berger d’Israël ».
Là, ils déposeront leurs présents et malgré leur foi imparfaite, ils se prosterneront en un acte d’adoration, devant celui dont même la naissance annonce déjà le combat et la révélation de la vie qui gagne sur la mort.
Quelques années plus tard, ce petit enfant, devenu grand, prendra la tête d’un groupe de pêcheurs auxquels il confiera la mission d’annoncer la Bonne Nouvelle aux nations prises dans leurs filets. C’était au pied d’un lac, appelé parfois mer de Galilée, qu’il établira un groupe de douze. Ils le suivront timidement jusqu’au pied de la Croix. Là, plongés dans les ténèbres de la mort, ils se laisseront paralyser par la peur. Trois jours plus tard, la lumière de la Résurrection les illuminera pour les envahir de la Vérité du Ressuscité, et, recevant la force de l’Esprit, ils deviendront les premiers témoins, courageux et déterminés. Retournés auprès du lac, ils le verront et recevront leur mission de pêcheurs d’hommes.
Notre foi et notre baptême viennent de cette transmission qui, de génération en génération, se propage en s’appuyant tour à tour sur l’appel de l’étoile, l’efficacité du filet et le rayonnement de la Croix.
Quelle est donc l’étoile qui nous guide aujourd’hui, et qui nous invite à suivre le Roi des rois, le Messie, nous faisant passer de l’inquiétude incertaine à la très grande joie de ceux qui se savent aimés de Dieu ? Étoile qui nous met en mouvement, pour déposer nos cadeaux du présent, aux pieds de l’enfant.
Et quels sont ces filets dont nous nous servons pour annoncer la Bonne Nouvelle à nos contemporains, et dont l’efficacité dépasse largement nos compétences ou même nos talents ?
Enfin, sommes-nous fidèles à la Croix du Sauveur, en demeurant pauvrement mais filialement à ses côtés, y compris au cœur des tribulations du monde, pour rester ces témoins dont il a besoin ? Croix que nous portons et dont nous nous marquons à chaque fois que nous nous signons, marquant ainsi notre appartenance au Christ.
Alors, avertis par l’expérience et l’obéissance, nous savons que c’est par un autre chemin que nous annonçons à notre prochain l’heureuse découverte faite dans nos vies, et qui nous a convertis. Des mages d’Orient, des apôtres d’antan ou d’aujourd’hui, c’est le même chemin intérieur qui est emprunté.
Que Marie demeure cette étoile discrète à laquelle nous nous arrimons pour demeurer fidèle aux enseignements de son Fils et lancer efficacement les filets, en vue d’annoncer à temps la Bonne Nouvelle.
Références des textes liturgiques :
Livre du prophète Isaïe LX, 1-6 ; Psaume LXXI (LXXII) ;
Lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens III, 2-3a.5-6 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu II, 1-12