2ème dimanche de carême Année B
Dimanche 25 février 2024
Accomplir la volonté de Dieu
Il est difficile de se sentir à l’aise devant la première lecture. Comme père, je ne peux m’imaginer obéissant à la demande d’un dieu qui me demanderait de lui sacrifier un de mes enfants… Et je ne peux même pas imaginer que notre Dieu, un Dieu d’amour, fasse une telle demande à un père, même pour le mettre à l’épreuve !
Et ce malaise n’est pas d’aujourd’hui. Dans certains très vieux commentaires juifs de la Bible, on imagine un dialogue entre Abraham et son fils, faisant de ce dernier une victime consentante… Mais juifs, chrétiens et musulmans accordent une grande importance à ce texte, quoique pour des raisons différentes.
On peut s’en sortir de bien des manières… Rejeter le texte… N’y voir qu’un texte à portée théologique, et faire le lien avec Dieu qui nous envoie son fils Jésus Christ qui offrira sa vie pour nous sur une croix ! Et c’est en effet une lecture fondamentale de ce texte, et c’est bien celle à laquelle nous invite la liturgie d’aujourd’hui, en particulier à travers la seconde lecture qui nous dit « Dieu n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous ». Pour nous tous, et non en sacrifice à lui-même d’ailleurs...
Mais doit-on s’arrêter là ? Est-ce qu’il peut y avoir là quelque chose qui nous concerne, aujourd’hui ?
L’histoire relatée ici remonterait à quelques 3000 ans avant Jésus Christ, alors que le texte a été rédigé plus de deux millénaires plus tard. On a le droit de prendre un peu de recul par rapport à son caractère historique, ce qui ne nous dispense pas d’en rechercher le sens profond.
Nous savons que dans des sociétés antiques les sacrifices humains ont existé, allant, pour des parents jusqu’au sacrifice de leurs propres enfants. Alors, pourquoi un personnage comme Abraham ne se serait-il pas demandé jusqu’où obéir à Dieu ? Si Dieu lui demandait la vie de son fils, serait-il prêt à le sacrifier ? Dans la mentalité de l’époque, il n’était sans doute pas absurde d’imaginer que Dieu lui même pouvait mettre à l’épreuve Abraham en lui demandant cela. Si nous regardons cela avec malaise aujourd’hui, c’est justement parce que tout l’enseignement de la parole de Dieu, depuis Abraham jusqu’à Jésus nous pousse à regarder le sacrifice humaine avec horreur !
Nous ne devons certainement pas prendre modèle sur Abraham sur ce point précis ! Nous pouvons être amené à sacrifier nos enfants, mais symboliquement, en acceptant leur départ du foyer familial, en acceptant qu’ils fassent des choix que nous avons du mal à comprendre ou à accepter…
Nous pouvons nous demander : jusqu’où suis-je prêt à aller pour obéir à la volonté de Dieu ?… Mais il ne faut pas s’y attarder, car cela peut devenir vertigineux et nous amener à nous faire mal en imaginant des renoncements que Dieu ne nous demande pas ! Ce n’est que lorsque nous avons à faire des choix vraiment difficiles que nous recevons la grâce nécessaire...
Pour ma part, j’ai obéi à la volonté de Dieu en devenant Diacre, ce qui ne me demande de sacrifier qu’une part de mon temps libre. Nos prêtres ont fait un choix bien plus radical !
Mais la volonté de Dieu ne se manifeste pas souvent dans des choix radicaux. Elle réside dans des petites décisions, des petits choix que nous pouvons faire tous les jours. Même dans le fait de s’arracher à la lecture de son journal pour répondre à une question, rendre un service... Dans le fait de renoncer à une journée de détente pour rendre une visite, accompagner des familles en deuil…
La volonté de Dieu, c’est le plus souvent le service du prochain, dans l’instant présent ! La volonté de Dieu, c’est souvent la petite voix intérieure qui nous invite à faire quelque chose. Et devant des décisions à prendre, petites ou grandes, demandons nous simplement : quelle est la volonté de Dieu ?
Amen
Références des textes liturgiques : Genèse 22, 1-2.9-13.15-18, Psaume 115 (116b), 10.15, 16ac-17, 18-19, Rm 8, 31b-34, Marc 9, 2-10