Saint Jour de Pâques
31 mars 2024 église Saint Jean-Baptiste, Vif
L’Église du matin de Pâques
L’Église du matin de Pâques, c’est d’abord ce petit groupe de femmes qui, « parties de grand matin » pour voir un sépulcre et embaumer un cadavre, découvrent soudain « qu’elles n’ont plus à chercher parmi les morts celui qui est vivant… » et s’en retournent en toute hâte en porter la joyeuse nouvelle aux apôtres et aux disciples. Premières à chercher Jésus après la tragédie du Golgotha, premières à le rencontrer vivant, premières à entendre la parole de paix et l’appel à l’évangélisation, elles forment la première communauté pascale. En elles vient de naître la joie de croire et de dire que Jésus est ressuscité…
L’Église du matin de Pâques, c’est cette pécheresse pardonnée qui pleure au bord d’un tombeau vide parce que quelqu’un, croit-elle, a enlevé le corps crucifié du Seigneur. Puisque c’en est fini et bien fini de Jésus vivant, que du moins elle puisse encore l’approcher mort ! Qu’il lui soit permis de répandre une dernière fois sur lui le plus précieux de ses parfums et de l’essuyer de ses cheveux !... Mais voici que quelqu’un vient. Il parle… Pourquoi pleures-tu ? Que cherches-tu ? Étrange résonance de ces questions si banales. Pourtant elle ne reconnaît pas Jésus. « Si c’est toi qui l’as enlevé, dis-moi où tu l’as mis. » C’est seulement lorsque tombent des lèvres de l’étranger les deux syllabes de son nom que le voile se déchire. « Jésus lui dit : Marie ! Elle se retourne et dit : Rabbouni ! »
Premier cri de la foi pascale. Première profession de la foi chrétienne. Le Credo de l’Eglise en son jaillissement ! Mais tout de suite la première épreuve. Marie Madeleine voudrait tellement retenir celui dont l’absence l’avait brisée. Elle apprend qu’il lui faut y renoncer. C’est autrement qu’elle restera dans l’intimité du maître bien-aimé. « Ne me retiens pas !... » Viennent alors, déjà inséparables, la première catéchèse et le premier envoi en mission. « Toi, va trouver mes frères et dis-leur que je monte vers mon Père qui est votre Père, mon Dieu qui est votre Dieu. » Et ce raccourci extraordinaire qui résume tout le témoignage apostolique : « J’ai vu le Seigneur et voilà ce qu’Il m’a dit ! »
L’Église du matin de Pâques, c’est ce groupe d’hommes encore divisés, presque tous sceptiques devant ces paroles « qu’ils prennent pour du délire ». Comment pourraient-ils croire ? Comment pourraient-ils seulement envisager l’hypothèse d’une résurrection de Jésus ? Non seulement celui qu’ils ont suivi est mort mais surtout Il est mort désavoué, désavoué par le peuple, par les représentants de Dieu et, en apparence, par Dieu lui-même ! Jésus s’est trompé. Ils se sont trompés. Nous espérions qu’il était celui qui allait délivrer Israël. Leur espérance est morte… Pourtant ils se rendent au tombeau. « Ce qu’ils voient est conforme à ce que les femmes avaient dit. Mais lui, ils ne le voient pas. Alors ?
L’Église du matin de Pâques, ce sont Pierre et Jean, les premiers croyants du groupe des apôtres. Sur la parole de Marie-Madeleine « ils courent tous les deux ensemble » vers le tombeau. « Le disciple que Jésus aimait arrive le premier. Mais il n’entre pas. » Il laisse la priorité à celui que Jésus avait choisi pour prendre la tête du groupe des Douze. Déjà le premier dans l’affection s’incline devant le premier dans la mission. Il le suit. « Il entre donc à son tour dans le tombeau. Il voit et il croit. »
L’Église du matin de Pâques, c’est Marie, la mère du Seigneur. Dans la maison où, sur la demande de Jésus agonisant, Jean l’a recueillie depuis la veille, elle espère contre toute espérance, « le cœur transpercé » mais paisible. « Fiat ! » Mais voilà que la rumeur l’atteint : rumeur des anges, rumeur du tombeau vide, rumeur du jardinier. Elle n’a pas besoin de voir, d’entendre et de toucher. D’emblée, elle comprend que Dieu a exaucé le cri de son Fils unique et qu’elle est devenue la mère de ce peuple innombrable des disciples que Jésus aime comme ses propres frères. Joie, joie, pleurs de joie. « Allégresse à cause de Dieu son Sauveur ». Le Magnificat de sa jeunesse n’en finira plus de retentir en elle et dans toute l’Eglise, de générations en générations…
Références des textes : Livre des Actes des Apôtres X, 34a.37-43 ; Psaume CXVII ; Lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens III, 1-4 ou Première Lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens V, 6b-8 ; Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean XX, 1-9 ou Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc XVI, 1-7