Douzième dimanche du Temps Ordinaire Année B
S 22 juin 2024 église Saint-Barthélemy, le Gua et D 23 juin 2024 église Saint Jean-Baptiste, Vif
Jésus calme la tempête
Jésus dit aujourd’hui à ses apôtres : « Passons sur l’autre rive ». C’est le Christ lui-même qui nous invite toujours à aller de l’avant. L’autre rive, dans l’Evangile, c’est la Décapole, c’est-à-dire les païens ! Allons à la rencontre de ceux qui ne connaissent pas encore le Seigneur ! Soyons en route ! Le Seigneur veut nous entraîner à sa suite dans une sorte d’exode. En avant ! En avant ! Il nous demande de quitter nos aises pour rechercher ce qui est le véritable confort : l’installation de Dieu en nous. Dans l’Évangile, la barque est toujours le symbole de l’Eglise. Et, toutes les fois qu’il est fait mention de barque, il y a en même temps la tempête. La tempête, ce sont les difficultés, c’est la guerre que le monde mène contre l’Eglise, ce sont les persécutions. Jésus monte dans la barque pour enseigner : c’est l’Eglise enseignante, « Mater et Magistra », l’Eglise est la barque du Salut.
Que se passe-t-il ? Matthieu dit : « … Une grande agitation se fit dans la mer », une sorte de séisme, et Il dormait. Marc dit qu’Il dormait sur un coussin. Ses disciples Le réveillent. Ils Lui disent : « Maître, nous périssons ! Cela ne te fait rien ? » Jésus se lève. La tempête ne Le touche pas. Elle touche son Eglise mais Il veille. Avant d’apaiser la tempête, que leur dit-Il ? « Hommes de peu de foi ». Parce que, pour Lui, il y a un danger beaucoup plus grave que les persécutions, c’est le peu de foi. Aujourd’hui, le véritable problème auquel nous avons à faire face, en tant que chrétiens, c’est le peu de foi des chrétiens. On voudrait des assurances, des certitudes mondaines et on ne met plus notre confiance dans le Seigneur qui a dit : « N’ayez pas peur ! » Dans l’évangile de Marc, le Christ commence par apaiser la tempête et, ensuite, Il leur fait la remarque. Mais, chez Matthieu, c’est plus en profondeur, Il leur dit : « Vous me décevez ! Comment pouvez-vous douter alors que je suis avec vous ? Même si je dors, je veille sur vous. » Le Cantique des cantiques ne dit-il pas : « mon bien-aimé dort mais son cœur veille » ?
Je me rappelle quand Notre-Seigneur priait sur la montagne, il était trois heures du matin, Pierre et ses autres apôtres étaient en mer. Il y a eu une tempête, et Il était là. Parce que quelqu’un qui prie ne peut pas ne pas prendre dans ses prières ceux qu’il aime. Donc Il veillait. Même quand Il est loin, Il est là. Et quand on dit à quelqu’un ‘je prie pour vous’, cela veut dire que nous les Lui confions et qu’Il sera là, avec eux. On ne peut pas prier et ne pas faire attention aux autres. Nous Le cherchons et Il nous cherche.
Alors qu’Il était sur la montagne, Il voyait que son Eglise était en danger. La barque était en danger. Il ne pouvait pas ne pas être là. L’évangile nous dit que, parce qu’il y avait une tempête et qu’il faisait nuit, ses apôtres ne L’ont pas reconnu. Souvent son visage est voilé par nos difficultés. Souvent, quand nous souffrons et qu’on nous parle de la Croix, nous disons : ‘Je souffre ! Je ne vois plus clair !’ alors qu’Il est là. Mais, si nous ne Le voyons pas, nous entendons sa voix. Il nous dit : « C’est moi ! » et nous reconnaissons sa voix, comme les enfants qui disent : ‘C’est moi !’ quand ils téléphonent. Cinq milliards de personnes peuvent dire cela, mais à des gens qui les connaissent. Quand nous entendons la voix du Maître, il est impossible de ne pas Le reconnaître.
Quand le Christ a dit : « C’est moi ! », Pierre Lui a demandé : « Si c’est toi, fais que je vienne à Toi ! » et Il l’a appelé : « Viens ! » Pierre n’a pas hésité puisque c’est Lui, l’ami et l’amant de l’humanité, qui l’appelait. Il s’est jeté à l’eau et il n’a même pas pris la précaution de se vêtir. Il marchait sur l’eau, les yeux fixés sur Jésus. Il pouvait braver le danger, il pouvait dompter la tempête tant qu’il avait les yeux fixés sur Lui. Mais que s’est-il passé ? Pendant la traversée, donc pendant l’exode, pendant le ‘habar’ – d’où le mot ‘hébreu’ -, Pierre a pris conscience de la tempête. « Il a eu peur », pourtant il L’avait devant lui, et il a commencé à s’enfoncer. C’est normal.
Le Seigneur Jésus lui dit : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? », alors qu’humainement parlant, il ne pouvait pas ne pas douter. Mais Il s’adresse à ce qu’il y a de plus profond en l’homme. Cela veut dire que, malgré toutes les tempêtes, nous n’avons pas le droit de douter de l’efficacité de notre prière et de Sa présence. C’est ce qui est arrivé à Pierre, il a pu marcher sur l’eau. Qui peut marcher sur l’eau ? Personne. Selon le principe d’Archimède, selon les lois naturelles, on ne peut pas marcher sur l’eau. Mais celui qui a Jésus pour ami, comme compagnon de route, peut braver même les lois naturelles. Avec Lui, marcher sur l’eau devient chose facile.
Les saints, ces ‘éclaireurs’ qui nous ouvrent la route, sont des êtres qui ont pris au sérieux les paroles du Christ : « Hommes de peu de foi, pourquoi avez-vous douté ? » et « N’ayez pas peur ! Je suis avec vous », et ils ont fait de nous des héritiers. A-t-on le droit de douter quand nous avons la certitude, pas seulement intellectuelle, mais qui enveloppe tout l’être, qu’Il est là ?
Aujourd’hui, est-ce que je ne me trouve pas dans la situation de ceux qui ont peu de foi parce qu’ils n’ont pas été exaucés, par exemple ? Parce que je crois qu’être exaucé, c’est l’être selon mon envie et non selon la sienne. Souvent on demande ce qui nous plaît et Il nous donne ce qu’il nous faut : on demande la santé, Il nous donne la résignation ; on demande la richesse, Il nous donne la tempérance.
Lorsque nous vivons une difficulté, quelle qu’elle soit, il y a deux solutions : ou bien se désespérer et aller trouver des psychiatres, des psychologues, prendre des comprimés, téléphoner à droite et à gauche… en essayant de trouver une solution horizontale, prendre des palliatifs qui ne font que remettre le mal à demain. Ou bien, se demander : ‘Que veux-Tu me dire à travers cela ?’ As-Tu disparu ? Non ! Quand un enfant est porté par son père, par sa mère ou par quelqu’un qui l’aime, a-t-il peur s’il pleut, s’il vente, s’il tonne, s’il y a des éclairs ou même s’il y a des coups de feu dehors ? Non. Si on a déjà la certitude de pouvoir être protégé par un homme ou par une femme, à plus forte raison par Lui. Mais il faut abattre en nous le mur entre ce qui existe dans notre tête et ce qu’il doit y avoir dans notre cœur. Il faut nous convaincre que ce que le Christ nous a communiqué depuis deux mille ans, et qui continue de se vivre dans l’Eglise par plus d’un milliard et demi de chrétiens, est vrai. Il suffit d’essayer !
Seigneur, Tu veux nous montrer que le peu de foi est le plus grand danger qui menace l’Eglise. Le peu de foi paralyse. Il rend peureux et fragile. C’est plus grave que la tempête qui reste extérieure. Le peu de foi est intérieur et il nous accompagne. On peut être protégé des tempêtes extérieures en étant, par exemple, dans un monastère ou au sein d’une famille unie et heureuse. Mais alors, d’où vient le danger ? De la jalousie, de l’orgueil, du manque d’enthousiasme… La tempête souffle toujours contre l’Eglise et donc contre tous ses membres. Mais le Seigneur veille. « Les portes de l’Enfer ne prévaudront pas contre elle ». c’est la promesse de Jésus. Or, notre regard, au lieu de se porter sur Jésus, se pose sur les difficultés. Pourquoi la confession dénoue-t-elle ? Parce que la confession, tout en n’occultant pas les difficultés, rend la réalité claire : elle met en lumière que ces difficultés font partie intégrante de notre vie. Le Christ s’est réveillé physiquement et Il nous réveille intérieurement. Il nous réveille à la foi avant d’endormir la mer. Que notre regard ne soit jamais porté sur la tempête mais sur Toi, qui te tiens toujours à nos côtés, même au milieu de la tempête !
Références des textes : Livre de Job XXXVIII, 1. 8-11 ; Psaume CVI (CVII), 21a.22a.24, 25-26a.27b, 28-29, 30-31 ; Deuxième Lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens V, 14-17 ; Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc IV, 35-41