Paroisse Saint Loup


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Vingt-huitième dimanche du Temps Ordinaire – Année A

dimanche 16 octobre 2017 église Saint Jean-Baptiste de Vif

Ceux qui n’ont pas le vêtement de noces

« Je peux tout en celui qui me donne la force. » Philippiens IV, 13.
A la fleur de l’âge, nous comptons sur notre force pour surmonter les obstacles se dressant sur notre chemin. Or, avec le temps, cette force qui était naturelle commence à faire défaut et une certaine faiblesse se fait sentir. En vieillissant, cette vigueur qui caractérise la jeunesse est souvent amèrement regrettée. Bien sûr, de plus jeunes mettent gentiment leur énergie à la disposition des plus anciens, mais cette faiblesse ressentie dans le corps éveille aussi le besoin de recourir à une autre force : celle que représente la présence de Dieu au cœur de l’existence. Les personnes âgées s’approprient souvent cette force émanant de la prière, de la quiétude et de cette nécessité de tenir bon, avec Dieu.
La force physique des jeunes années finit par diminuer. Mais même affaibli dans le corps, il est toujours possible de trouver en Dieu une force bien réelle et durable.
La parabole des invités qui se dérobent a, en réalité, deux parties : il y a l’invitation du roi qui convoque ses amis pour les noces de son fils et n’obtient que des refus plus ou moins polis ; il y a aussi la deuxième invitation beaucoup plus large qui s’adresse, celle-ci, au tout-venant et qui rassemble une foule immense au milieu de laquelle détonne celui qui n’a pas revêtu la tenue de noce. La lecture brève fait disparaître ce dernier épisode, ce qui est bien dommage, car c’est lui, comme dans toutes les paraboles, qui donne la clé de l’ensemble : la surprenante rencontre entre la générosité infinie de Dieu qui accueille tout le monde et l’exigence brûlante qui ne tolère aucun manquement de la part de ceux qui ont commencé à bénéficier de son amitié. D’où la formule redoutable qui clôt l’ensemble : « beaucoup sont appelés, mais peu sont élus ».
Quel que soit le sens que l’on donne aux deux mots d’ « appelés » et d’ « élus », ce qui semble clair, c’est qu’il ne suffit pas d’être physiquement installé dans l’Eglise (c’est elle la grande maison où le roi rassemble ses invités) pour être sauvé. L’exigence du Seigneur est plus forte pour ceux qui ont commencé à goûter à ses dons. C’est tout le développement de l’Epître aux Hébreux qui montre cette gradation, jusqu’à la célèbre formule : « Oh ! C’est chose effroyable que de tomber aux mains du Dieu vivant ! » (Hébreux X, 31)
Mais, dira-t-on, ce n’est pas cela le Nouveau Testament, car Dieu nous y a révélé sa tendresse infinie, nous n’en sommes plus au Dieu vengeur de l’Ancienne Loi. La douceur du mont des Béatitudes a remplacé les hauteurs abruptes du Sinaï, Dieu ne s’adresse plus à nous dans l’orage, mais par la voix de Jésus. Pourquoi nous parlez-vous encore de châtiments et de vengeance ?
Vous trouvez que c’est si gentil que cela, les Béatitudes ? Vous n’avez pas entendu les malédictions qui les accompagnent : « malheur à vous, les riches ! Car vous avez votre consolation. Malheur à vous, qui êtes repus maintenant ! Car vous aurez faim » (Luc VI, 24-25) ? Vous croyez que l’Amour peut se résigner à voir bafouer la merveilleuse histoire qu’il a tissée avec les hommes ? Pauvre amour en vérité que celui qui prendrait tranquillement son parti de notre manque de goût !
Oui, notre réponse a du prix à ses yeux et donc des conséquences. Peut-être qu’à un enfant on peut laisser passer beaucoup de choses, mais avec celui qui a grandi, qui a mûri, dont l’intelligence s’est éveillée, on peut penser qu’il sait ce qu’il fait, au moins jusqu’à un certain point. Et peut-être même qu’à un certain stade il n’y a plus de retour possible, parce qu’on s’est complètement endurci. Jésus n’arrête pas de parler de cette éventualité terrible et pas seulement comme un épouvantail.
Il faut en prendre acte : nous ne sommes pas dans le cas de ceux qui, ignorant tout de l’amour, sont repêchés par Dieu dans les bas-fonds de ce monde. A ceux-là rien n’est demandé que de se laisser faire. Mais notre responsabilité est le premier don que Dieu nous fait. Si, au commencement, nous avons été vêtus par lui de la robe baptismale, il faut à présent la laver, l’entretenir. Et en refusant ostensiblement de la porter, on déshonore le don reçu et on s’éloigne du Donateur.
Cette parabole de Jésus est peut-être la plus belle histoire du monde car c’est la plus belle histoire d’amour ! Il parle de lui-même, évidemment, car Jésus est amoureux, il a épousé une fiancée qu’il aime passionnément : l’humanité. Mais tous les invités ne voulaient pas venir ; pauvre roi, quelle déception ! Le roi, cependant, ne se résigne pas : il a un tel désir de notre salut qu’il continue à frapper à la porte de notre cœur et envoie à nouveau des invitations. Personne n’est exclu du festin ! Et le roi qui lit dans les cœurs voit si nous avons ou pas le vêtement des noces, c’est-à-dire si nous sommes revêtus de miséricorde. C’est un vêtement que nous devons tous revêtir, car la miséricorde couvre un grand nombre de péchés.
Oui, l’amour est fort comme la mort. Il ne tolère pas de demi-mesure.

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques :
Isaïe XXV, 6-10a ;
Psaume XXII (XXIII) ;
Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens IV, 12-14.19-20 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu XXII, 1-14.