Homélie pour la Fête du Baptême du Seigneur
D 9 janvier 2022 église Saint Jean-Baptiste, Vif
Le Baptême du Christ, la joie de Dieu
L’Église commémore le Baptême de Jésus, l’une des grandes théophanies par lesquelles « il manifesta sa gloire » aux commencements de l’œuvre du salut. Dans le Jourdain, le Christ reçoit l’onction messianique de l’Esprit-Saint, qui le confirme dans sa mission, tandis que la voix du Père l’accrédite auprès des hommes : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ». « Ainsi, nous pouvons apprendre qu’après notre baptême, l’Esprit-Saint vole des portes du ciel jusqu’à nous, et nous devenons fils de Dieu grâce à la Parole du Père qui nous adopte » (saint Hilaire de Poitiers). Par son Baptême, le Christ inaugure son ministère public. De celui-ci nous serons les témoins, dans la liturgie du Temps ordinaire, jusqu’à son accomplissement dans le Mystère pascal.
La fête du Baptême de Jésus est celle de la joie de Dieu, et en achevant le cycle liturgique de Noël, elle en donne une dernière fois la note fondamentale : « Il y eut une voix venant du ciel et qui déclara Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. » (Luc III, 21)
La « naissance éternelle de Jésus » (Charles Gay) est comme la raison première de la joie qui est en Dieu et qui, de Dieu, se répand dans l’Église. Cette fête tout intérieure, dont Dieu seul a par nature la jouissance, passe dans la Création quand ce Fils béni se fait homme. L’Incarnation est pour nous, pauvres mais bien-aimées créatures, ce qu’est, pour la Trinité divine, la bienheureuse génération du Verbe. Par l’Incarnation, Dieu qui n’était qu’à Dieu est à nous ; Dieu qui n’était que Dieu est Dieu-homme ; Dieu qui n’était qu’en Dieu prend séjour en toute âme de bonne volonté. Ainsi la fête s’étend, la joie se propage.
Cette propagation de la joie de Dieu va maintenant envahir toute l’année qui commence. Cette joie va devenir la nôtre à proportion de notre union à Jésus, car non seulement Jésus-Christ Notre-Seigneur a fait toutes les volontés de son Père, et s’est soumis à lui et à toutes choses pour l’amour de lui, mais encore il a mis tout son contentement, sa félicité et son paradis en cela : « Ma nourriture, dit-il, c’est que je fasse la volonté de celui qui m’a envoyé », c’est-à-dire : je n’ai rien de plus désirable, ni de plus délicieux, que de faire la volonté de mon Père. Car en effet, dans toutes les choses qu’il faisait, il prenait un contentement infini à les faire, parce que c’était la volonté de son Père.
Bien souvent, nous ressentons la volonté de Dieu comme une pénible contrainte ; mais saint François de Sales disait : « la loi de Dieu est une loi toute d’amour et toute douce ». La fête de Noël nous aura fait découvrir ses commandements comme un chemin de joie qui s’ouvre devant nous.
Mais que rendrons-nous à Dieu ? Nous aussi, en retour, faisons des fêtes à Dieu, des fêtes dignes de lui, des fêtes qui le réjouissent. Nous avons ce pouvoir, pauvres enfants de la terre, si faibles, si misérables et naguère encore si pécheurs. Quelle sera donc la fête que nous donnerons à Dieu ? Celle-là même qu’il nous donne ; car il n’y a qu’une fête, parce qu’il n’y a qu’une joie ; il n’y a qu’une joie, parce qu’il n’y a qu’un amour ; et il n’y a qu’un amour, parce que, au ciel et sur la terre, il n’y a qu’un Jésus. Donnons Jésus à Dieu, et voici que nous avons mis Dieu en fête. Renonçant à notre propre esprit, à notre amour-propre, à tout ce qui s’appelle chair, convoitise, orgueil, vanité, égoïsme, « revêtons-nous du Christ » ; ne laissons vivre, agir, parler et paraître en nous que le Christ ; y a-t-il un bonheur pareil à celui d’une créature qui rend son Créateur heureux ?
Références des textes liturgiques : Livre du Prophète Isaïe XL, 1-5. 9-11 Psaume CIII (CIV), 1c-3a, 3bc-4, 24-25, 27-28, 29-30 Lettre de saint Paul apôtre à Tite II, 11-14 ; III, 4-7 Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc III, 15-16. 21-22